"Du combat, seuls les lâches s'écartent" disait Ulysse dans l'Illiade.
Le moins que l'on puisse dire c'est que Cellendhyll ne fait pas partie de cette catégorie au vu du nombre important de combat dantesques qu'il mène dans ce tome 6, premier du second cycle de l'agent des ombres. Ce tome opère des changements indéniables tout en restant dans la continuité.
En effet, les modifications par rapport aux tomes précédents touchent principalement à la forme alors que le fond demeure. Ainsi, les éditions Fleuve Noir reprennent les aventures de Cellendhyll en lieu et place de Mnemos et l'ange du chaos illustré en couverture par Julien Delval adopte cette fois des cheveux courts plus conformes à la vision qu'en avait Michel Robert. Concernant les changements sur le fond, la partie du Chaos qui s'est déroulée sur cinq tomes prend fin avec Guerrier des lunes qui nous transporte cette fois-ci dans un nouveau cycle se déroulant dans l'empire de lumière de l'empereur Priam. Nous retrouvons en revanche dans la continuité l'action débridée, le sexe et les personnages hauts en couleur qui constituent la marque de fabrique des écrits de Michel Robert.
Guerrier des lunes constitue clairement un tome de présentation de la nouvelle intrigue et en tant que tel apporte peu de révélations fracassantes.
Cependant, outre l'histoire relativement simple traitant de l'enquête de Constance et Cellendhyll sur des meurtres atroces commis par magie sur des colons, le livre aborde sur un autre niveau plus complexe les prémisses d'une intrigue plus vaste qui rejoint certains éléments distillés dans le premier cycle et le one shot sur Gheritarish. Les quelques indices de ce tome sont judicieusement dispersés pour donner au lecteur envie d'en savoir plus mais on peut déplorer les interventions sibyllines de Maurice dont les logorrhées énigmatiques et grandiloquentes sont plus irritantes qu'intrigantes.
Il est tout aussi regrettable de voir l'emploi de certains raccourcis, de quelques facilités de scénario avec notamment le caractère monolithique et caricatural des "méchants" dont l'absence de psychologie diminue l'intérêt et rend leurs réactions prévisibles. Ce dernier aspect, récurrent sur les derniers tomes, est d'autant plus dommage que les personnages de Cellendhyll et Constance, ainsi que l'idylle naissante de l'ange du chaos sont traités avec finesse et émotion. La ruse et l'aspect imposant de Priam, l'empereur de lumière, en font aussi un personnage des plus intéressants.
Concernant la forme, il faut souligner l'apparition de quelques coquilles.
Avec ses combats plein de fougues, de rebondissements, sa sensualité à fleur de page et ses personnages pour la plupart très développés, Guerrier des lunes reprend avec brio les ingrédients qui ont fait le succès du premier cycle.
Michel Robert a réussi la transition dans un nouveau monde et une nouvelle intrigue en donnant un nouveau souffle aux aventures très attendues de Cellendhyll. Il a su éviter les pièges des reprises de cycles et a démontré qu'il savait parfaitement où il comptait emmener un lecteur qui ne peut manquer d'être gagné à sa cause, enivré par les prouesses de l'adhan.
— Belgarion