Tykko des sables ouvre donc le bal de ces légendes de Troy, qui doivent mettre en scène personnages et lieux jusqu'alors laissés dans l'ombre du fameux monde de Troy.
Premier album d'un triptyque, nous voilà plongés en plein désert, dans la vie ordinaire d'un caravansérail, alors que se prépare une course qui pourrait bien changer le destin de nombreux personnages.
En suivant les pas de Tykko, un simple bousier, les scénaristes nous invitent à découvrir les vexations et les injustices du quotidien que ceux qui n'ont pas la chance de disposer de l'argent ou du pouvoir ont pris l'habitude d'endurer. La magie ne joue pas ici un grand rôle, du moins, pour le moment. Ce sont avant tout les enjeux moraux et personnels qui priment, et en dehors de la séquence du Défi des 13 Tribus, qui évoque immanquablement la course de Pods de La Menace Fantôme par son cadre ou son déroulement, il n'est pas vraiment question d'aventures à la Lanfeust. Sur ce plan-là, la BD remplit donc tout à fait son cahier des charges.
Il n'empêche que ce pauvre Tikko semble porter sur ses épaules tous les malheurs du monde. Nos dix doigts ne suffisent probablement pas à faire la liste des tuiles qui lui tombent sur la tête en 52 pages. Si cet angle est intéressant (voire surprenant pour une telle BD) et une certaine noirceur manifeste, l'angle est parfois tellement forcé – tous pourris ? Nous n'en sommes pas loin. – qu'il perd de son impact sur le lecteur.
Il en ressort une certaine naïveté du propos, un sentiment que le dessin de Keramidas contribue à accentuer, bien malgré lui sans doute. Les tons chauds de la colorisation et les rondeurs du trait sont difficilement critiquables, d'autant qu'il s'en dégage une patine très appréciable qui donne vie à un monde coloré et exotique, mais, de fait, ils atténuent aussi la noirceur du récit qu'ils illustrent.
Se suivant sans déplaisir, ledit récit ne surprend finalement guère dans son déroulement, même si la fin ouverte promet de changer concrètement la donne cette fois, et pas seulement l'espace de quelques planches.
Voilà en tout cas un album qui semble sincèrement désirer dépasser son statut de « série dérivée profitant de la renommée de la série-mère », mais qui va devoir proposer un peu plus encore.
— Gillossen