Premier livre de la série des Félix Castor, inédit en France à ce jour pour d’obscures raisons éditoriales, The Devil You Know se situe au croisement de deux genres, l’urban fantasy telle qu’elle s’est popularisée ces dernières années, et le roman noir, dans son versant hardboiled (immortalisé par la figure du détective privé lancé dans une quête pour la vérité).
La principale réussite de son auteur est d’avoir fusionné harmonieusement ces deux genres et, au final, de dépasser le simple exercice de style. Du roman noir, Mike Carey garde la figure de l’enquêteur solitaire, un brin désabusé par la vie mais qui ne renonce jamais, quelles que soient les embûches placées sur son chemin. Cette figure du détective (car Félix Castor en est bel et bien un, quoique pas au sens classique du terme) permet également d’obtenir une confrontation entre des milieux sociaux bien distincts, avec notre héros en seul dénominateur commun entre la société policée « bien-comme-il-faut » et les bas-fonds londoniens. De l’urban fantasy, Mike Carey conserve le cadre et les éléments surnaturels, mais en dépouillant ce genre de toute la sentimentalité qui, en bien comme en mal, en est souvent l’une des principales constituantes.
Au programme de cette première enquête, Félix Castor, exorciste-investigateur de son état, est appelé pour exorciser le fantôme d’une jeune femme. Une tâche qui ne devrait en toute logique ne poser aucun problème particulier. Mais notre homme a pour défaut la curiosité, et son intuition lui souffle qu’il y a quelque chose de pourri au royaume des Ombres… Et en cherchant des explications aux événements qui troublent la sérénité des Archives Bonnington, il va alors se trouver mêlé, pratiquement malgré lui, à une sinistre affaire qui risque d’ébranler ses certitudes les plus profondes.
Mike Carey ne fait jamais de son Félix Castor un parangon de vertu infaillible, bien au contraire. Il n’est pas un super héros, simplement un homme doté de quelques capacités surnaturelles qui, loin de lui avoir apporté bonheur et prospérité, l’ont conduit à adopter une vision plutôt cynique et sans concession de l’existence.
Le récit est mené sur un rythme vif et la plume de son auteur est très efficace, d’autant que quelques pointes d’humour corrosif viennent agrémenter l’ensemble. Mike Carey attache également une attention particulière au contexte général de l’action et n’hésite pas à glisser quelques éléments de critique sociale qui, sans faire du livre un quelconque brûlot politique, n’en sont pas moins les bienvenus.
Il s’agit en somme d’un très solide début de cycle, qui plaira sans doute aux amateurs des deux genres cités plus haut.
Les informations éparses que l’auteur distille au fil des pages sur la vie personnelle de son héros et la conclusion de ce premier tome laissent présager des pistes, espérons-le prometteuses, pour les prochains volumes.
— JohnDoe