Dans la série X-Files, la zone 51 est une base secrète qui, suspecte t-on, étudie la technologie extra-terrestre. Dans le monde inventé par Masato Hisa, il s'agit d'un lieu dans lequel sont parqués toutes sortes de monstres, divinités ou semi-divinités et autres créatures mythologiques. Mais également quelques humains, parmi lesquels notre héroïne, Tokuko McCoy, qui y exerce la fonction de détective privé : pas d'imperméable, mais des cuissardes en cuir, un jean, une chemise... et un colt 1911, d'un genre un peu particulier. Elle est secondée par Kishirô, un kappa échappé du folklore japonais.
Les deux premiers tomes nous présentent une série de courtes enquêtes afin de nous familiariser avec cet univers. La tonalité des récits est variée, allant du comique (Why are you guys so quiet dans le premier volume, I was getting rid of coffe & donuts dans le deuxième) au sordide (Farewell Mr. Vampire), en passant par le mélancolique (You look like a cat lover) Au fil des pages, on en apprend davantage sur le passé mystérieux de McCoy et sur les raisons qui ont poussé cette jeune femme dans l'Area 51... et sur ce qu'elle espère y trouver.
Le trait de Hisa est assez particulier ; ceux qui ont lu Jabberwocky, l'autre série publiée en français de l'auteur, le savent déjà. Tout en contrastes, il utilise beaucoup le clair-obscur, à l'image des films noirs des années 40, apportant une vraie personnalité visuelle au titre.
Le troisième tome développe le personnage de Kishirô, avant un retour à la veine burlesque avec une histoire complètement farfelue autour du père Noël ! Le quatrième tome, quant à lui, se partage entre un aperçu du Conseil des Dix Dieux, qui devrait jouer un rôle important par la suite, et une histoire autour de Blanche Neige et les Sept Nains très réussie.
Alors même que son pitch pouvait augurer un patchwork indigeste, Masato Hisa réussit à nous offrir, pour le moment, une des (très) bonnes surprises de l'année 2015.
Changement de coéquipier pour McCoy dans le cinquième volume avec l'une des figures les plus célèbres des contes de fées occidentaux. Ce nouvel allié sera plongé tout de suite dans le bain avec une hilarante quête... de nourriture complètement loufoque et décalée, puis c'est au tour du panthéon grec d'être mis à l'honneur dans une courte histoire qui va préfigurer un arc narratif s'étendant sur plusieurs chapitres. Celui ci augmente les enjeux de manière considérable, tant pour l'Area 51 elle même que pour notre héroïne, et prendra fin de manière particulièrement dramatique avec le terrible chapitre 29 (I'm counting on you Detective McCoy).
Histoire d'égayer un peu l'ambiance, c'est l'occasion de noter les très drôles chapitres bonus de fin de volume mettant en scène Hisa et son tortionnaire d'éditeur.
Le volume 8 marque le retour d'un personnage important : il s'agit, sans aucun spoiler (il figure en bonne place sur la couverture), de notre kappa préféré ! Les deux devront apprendre à retisser une relation abîmée par les événements des premiers volumes, tandis que le lecteur apprend deux éléments importants : comment Mc Coy est entrée en possession d'une certaine épée, et pourquoi son colt est devenu un tsukumo (une objet doué de conscience).
Alors qu'on approche des deux tiers de la série, celle-ci se montre toujours aussi haute en couleurs, bien servie par la patte graphique très personnelle de son auteur.
— JohnDoe
