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Folio SF a écrit :
Gobliiins a écrit :Un épisode sur la cuisine ?

Hum... valait mieux pas, vraiment !

Par contre on a peut-être un peu traité le sujet dans un autre épisode à venir. :sifflote:

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En rapport avec le contenu de l'émission, j'ai lu le livre sur l'écriture de Lionel et je suis un peu déçu. C'est très subjectif mais après avoir lu les Scott Card ou le Vonarburg et le King, le livre de Davoust ne m'a pas appris grand-chose. De plus, je trouve que le livre parle trop de tout dans la pop culture sauf (ou très très peu) de littérature. On parle de Star wars, de jeu vidéo, d'image, de scénario (sic! on parle roman donc littérature!) et d'écriture à l'américaine, mais en terme de littérature on évoque ou cite quelques petites choses mais c'est très succin. Où sont les exemples concrets issus de romans de sf ou fantasy ?

Autre chose : je trouve ça dommage de dire que de nos jours on doit écrire en fonction de la mode actuelle, donc bouffée par l'image, par la narration à l'américain, la netflixisation de la narration comme si c'était le must alors que non, pour moi (je dis bien que c'est ma vision) c'est le cancer de l'écriture tout ça. On veut trop faire comme les américains. On veut écrire comme eux parce que eux ça marche, ils vendent plus. Mais le nombre de ventes ne veut rien dire sur la qualité. Macdo se vend certainement plus que les restaurants bio familiaux... Il faut aussi admettre qu la narration, l'écriture, n'est pas la même d'un continent à un autre. La narration japonais n'a rien à voir avec la française qui n'a rien à voir avec l'américaine. Et ça me désole de voir que dans les conseils d'écriture, on retrouve de plus en plus l'idée qu'il faut s'ouvrir au boulot des USA. Je suis désolé mais à faire ça, à conseiller ça, on va y perdre.

Je suis d'accord avec Lionel quand il dit qu'un art évolue et qu'on écrit plus comme avant etc...mais de là à ne parler que d'images et de séries, de citer GOT (pour la série et non pas le roman d'ailleurs) etc...etc...je me disais "mais en fait la littérature , Lionel s'en tape." Je sais bien que non hein, je tiens à le souligner, mais c'est la sensation que j'avais durant ma lecture.

Écrire s'apprend : je suis d'accord oui et non. Oui, la langue, la syntaxe tout ça, le reste ne sont que des inventions, des codes qui en réalité, dans l'absolu, ne veulent rien dire et on peut-être fait leur temps. On trouve pléthores d'artistes (dans tous les arts) qui racontent autrement. Terrence Malick au cinéma, Greg Egan ou Watts en littérature SF, Kojima avec Death stranding, ou La maison des feuilles (je rappelle que c'est un premier roman) qui tentent des choses qui ne ressemblent à aucune autre et je pense que ces artistes ne font pas leur art en se disant : je dois être compréhensible et accessible à tous. Pour moi, l'amour de l'art et de la création fait fi du désir des gens. Ce sont aux gens d'accepter ou non une œuvre pas l'inverse (l’œuvre qui se base sur les gens pour être vues / lues par le plus possible). Si on suit cette logique, on ne tentera jamais rien de nouveau.

Et je pense que l’idée de connaitre les fondations avant de les dynamiter est un leurre : je m’explique, tous les artistes que j'ai cité plus haut ont commencé leur carrière direct e faisant ce qui leur plaisait à eux et en transgressant bon nombres de codes. Je pense qu'à trop suivre les codes, on en sort difficilement.

Et ce n'est pas pour rien que ça fait 4000 ans qu'on e raconte les mêmes histoires en Occident (je précise bien occident), sans jamais changer les codes. Genre c'est comme ça qu'on écrit une histoire et pas autrement. Mais d'où ça sort ? Qui a dit ça ? En Afrique par exemple, on ne raconte pas les histoire de la même façon. Je pense qu'en Occident on est formaté par la Grèce antique d'un côté et les USA de l'autre. Et pour moi, c'est une maladie. D'ailleurs, on constate que les œuvres qui divisent font moins de scores, mais marquent un certain public (de niche) au point d'en faire une œuvre culte tout de même. Mais oui, il faut le dire : l'originalité ne vend pas. Les œuvres obscures, trop personnelles non plus. Et pourtant, sans cette ouverture, nous n'aurions ni Malick, ni Egan, ni Lynch etc...etc...

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Pour le coup, pour dynamiter les codes, je reste absolument convaincue que si, c'est mieux de les connaître.
De toute façon, nous grandissons environnés des tropes de notre culture, et si nous ne les interrogeons pas, nous sommes quasi certainement condamnés à les répéter de manière inconsciente.

A la sortie de mon école (de scénario), je me suis retrouvée plusieurs fois à travailler avec d'apprentis réalisateurs qui voulaient faire du cinéma de genre (et révolutionner à eux seuls le cinéma de genre), et qui surtout ne voulaient pas connaître ce qui s'était déjà fait, qui refusaient d'étudier les codes et les grandes œuvres de SF, fantastique... Ils espéraient ainsi être d'évidence hyper originaux. Résultat ( j'en parle dans un épisode passé de Procrastination^^) : ils mettaient beaucoup d'énergie à réinventer (mal) des trucs déjà vus cent fois.

Bref, oui, pour vraiment inventer hors des codes, mieux on les connaît, mieux c'est. Dans les exemples cités par Dakeyras, je vais rester sur ce que je connais le mieux, le côté ciné. Terrence Malik ne surgit pas d'un coup au milieu du nulle part, il a un gros parcours universitaire, il travaille entre autre sur le scénario de l'Inspecteur Harry (difficile de faire plus classique)... Et même avec une vision de formaliste, il brasse dans tous ces films les grands thèmes fondateurs de la mythologie américaine (ça se voit dans le fond comme dans la forme : le rapport aux paysages et à la nature, le côté choral de certaines œuvres...).
Par contre, clairement, il fait partie de ces réalisateurs qui construisent leurs films au montage ( comme certains auteurs découvrent leurs livres avant tout en corrections, en partant d'un premier jet qui s'élance dans pleins de directions). C'est une méthode qui n'est ni la plus simple sans doute, ni la plus répandue, mais c'est une méthode quand même^^.

Après, on n'est bien sûr pas obligé d'apprendre à écrire, ni même de réfléchir sur l'écriture, pour écrire et trouver ça cool ( la seule règle, c'est qu'il n'y a pas de règle ;) ). Par contre, si on veut aller ailleurs, défricher peut-être quelques contrées nouvelles, pour moi, oui, il faut savoir d'où on vient.

Enfin, pour revenir au livre de Lionel, c'est avant tout un super bouquin technique, une des meilleures boîtes à outils pour construire des histoires. Si vous vous interrogez sur le fonctionnement interne d'un récit, ou de ceux que vous voulez écrire, je le recommande chaudement.
Si, également, vous voulez mieux maîtriser vos outils d'écrivain qui pouvoir rêver plus loin, emmener plus loin vos histoires, vos enjeux et vos personnages, pareil, je recommande aussi !
Et bonus, il est très agréable à lire, et jamais péremptoire.

Si vous vous interrogez davantage sur l'aspect organique de l'écriture, sur les rapports entre l'écriture et la vie, " Nous qui n'existons pas " de Mélanie Fazi peut être un très bon complément de lecture :).

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Par ailleurs, et là je rejoins peut-être dans ma réflexion Dakeyras, je trouve qu'on gagne beaucoup à étudier pleins de manières différentes de raconter des histoires, pour trouver les bases qui nous correspondent à nous ( en fait pour moi ça s'inscrit dans une réflexion générale sur la littérature, où pas mal de livres ont leur place ^^)

Par ex, dans mon travail, le soft world building, la manière de construire des univers de Miyazaki, le réalisme magique d'Amérique du Sud me parlent et m'inspirent beaucoup plus que le traditionnel world building à l'anglo-saxonne, pour résumer.
Après, quand on s'éloigne des impensés d'une partie du lectorat (et surtout des critiques), il y a un risque à la réception des œuvres, aussi ( on me dit parfois que je ne fais pas spécialement de world building, en fait je le fais différemment).

Mais j'ai l'impression qu'aujourd'hui, une grande partie du lectorat est largement prêt à nous suivre hors des sentiers bien balisés. Donc, je l'ai déjà dit souvent mais tant pis : merci aux lectrices et aux lecteurs :) !!

Au passage, dans les lectures complémentaires, si vous voulez explorer les frontières des genres, je conseille la "Bibliothèque de l'Entre-Mondes", de Francis Berthelot ;) - ça fait longtemps que je n'avais pas conseillé de livre de Francis Berthelot ^^

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Dakeyras a écrit :Autre chose : je trouve ça dommage de dire que de nos jours on doit écrire en fonction de la mode actuelle, donc bouffée par l'image, par la narration à l'américain, la netflixisation de la narration comme si c'était le must alors que non, pour moi (je dis bien que c'est ma vision) c'est le cancer de l'écriture tout ça. On veut trop faire comme les américains. On veut écrire comme eux parce que eux ça marche, ils vendent plus. Mais le nombre de ventes ne veut rien dire sur la qualité. Macdo se vend certainement plus que les restaurants bio familiaux... Il faut aussi admettre qu la narration, l'écriture, n'est pas la même d'un continent à un autre. La narration japonais n'a rien à voir avec la française qui n'a rien à voir avec l'américaine. Et ça me désole de voir que dans les conseils d'écriture, on retrouve de plus en plus l'idée qu'il faut s'ouvrir au boulot des USA. Je suis désolé mais à faire ça, à conseiller ça, on va y perdre.

Je suis d'accord avec ce que tu dis là. Mais je n'ai pas lu le livre de Davoust, donc je n'ai pas d'avis dessus.

Si tu cherches un livre de conseils d'écriture avec des exemples très précis, je ne peux que te recommander Conduire sa barque d'Ursula Le Guin, qui est remarquable de ce point de vue (et dont le traducteur, Bertrand Augier, a dû s'arracher les cheveux plus d'une fois, étant donné les remarques de Le Guin qui portent souvent sur des mots précis, des jeux de sonorités, etc.).

Et je renchéris sur le conseil d'Estelle Faye : Bibliothèque de l'Entre-monde est une réflexion importante doublée d'une mine de conseils de lectures !

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De mon côté, je n'ai pas spécialement vu de déférence à la monoforme hollywoodienne et ses succédanés dans le livre de Lionel - pas comme dans le Truby, par exemple ( L'anatomie du scénario de Truby, souvent considéré comme une bible, un livre avec lequel j'ai beaucoup de mal, ceux qui suivent Procrastination l'ont sans doute déjà remarqué...^^)

Pour moi, Lionel prend juste des exemples que ses lecteurs ont déjà des chances de bien connaître, c'est tout ( Le Roi des Singes ou la Parfaite Lumière, c'est fondateur aussi, mais ça risque de moins parler à une partie du public français ;) )

Et au passage, pour celles et ceux ici qui veulent creuser de la théorie littéraire un peu plus hardcore, si vous ne l'avez pas déjà fait vous pouvez aller voir du côté des grands classiques, type Genette ou Barthes - je ne suis pas d'accord avec tout chez eux, mais c'est intéressant également de savoir pourquoi on n'est pas d'accord avec un auteur.

Vous pouvez aussi aller regarder le travail des jeunes universitaires qui réfléchissent en ce moment même sur la fantasy, le fantastique, etc... , comme ceux du Laboratoire des Imaginaires (et c'est vraiment passionnant !)
https://lelaboratoiredesimaginaires.wordpress.com/

Et vive Francis Berthelot !!

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@Dakeyras : J'ai pour règle de ne jamais répondre aux critiques, mais là, ça serait bizarre, sachant que j'interviens régulièrement dans ce fil, de faire la sourde oreille. Brièvement, donc, et ce sera ma seule intervention sur le sujet (qui aurait plus sa place dans un fil à part, parce que Comment écrire de la fiction ? n'est pas Procrastination, et je ne suis pas Procrastination – le cas échéant, un ou une gentille modo-te pourrait-il déplacer les posts quand ce sera pertinent ?) :

J'explique texto que je cite surtout la pop culture pour des questions de référents plus vastes et de dénominateurs plus communs. Ce qui m'intéresse, c'est qu'on me pige : j'ai plus de chances que ça arrive en parlant de Star Wars que de La Maison des feuilles. :)

Concernant les codes et la façon d'écrire, il y a toute une section qui s'appelle "tout est possible tant que c'est bien fait", et qui met explicitement en avant l'aspect 200% subjectif du mot "bien". Je prends justement à cette fin l'exemple de Kerouac pour mettre en avant l'importance du travail, car l'idée que bien des créateurs et créatrices explosent d'un coup avec une vision en sortant de nulle part est la majorité des cas un mythe, car ils viennent fréquemment d'un intense travail antérieur, fréquemment invisible du public (Estelle parle de Malick ; tu cites Kojima, mais il n'a certainement pas commencé sa carrière avec Death Stranding ; si le premier Metal Gear est certes fondateur d'un genre, il ne naît pas de nulle part et on y trouve un lignage de gameplay clair hybridant l'évitement de Pac-Man, le jeu d'aventure en mode texte et les débuts du run and gun).

Désolé que tu n'y aies pas trouvé ton compte, mais visiblement, le livre t'a gratté dans le mauvais sens par rapport à tes attentes. Which is fine : visiblement, je ne tiens pas le discours qui te correspond. Comme dit dans l'intro, je t'encourage donc à réfléchir à ton propre discours, et à produire tes œuvres avec ta propre approche. Tant que le bouquin t'y a fait réfléchir et te propulse plus avant sur ton chemin, je considère qu'il a fait son taf ! Et, en toute sincérité, je te souhaite de parvenir à ces créations, et je veux les voir :)

(Et merci beaucoup, Estelle !)

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Je propose une petite contribution qui selon moi mérite le détour.
https://www.cnrtl.fr/
(Il y a un lien dedans pour le Crisco)

Ma bible depuis que j'écris ! À côté, les dictionnaires de synonymes types Robert ou Bescherelle semblent vraiment très pauvres. J'apprécie aussi beaucoup de pouvoir remettre en contexte les usages et les dates d'émergence d'un terme, pour éviter de dissoner avec tel ou tel arrière-plan (époque, culture, etc.). Je l'utilise également parfois pour initier une conceptualisation dans mes cours. Les distinctions sémantiques sont fines et très rigoureuses.
Donc je recommande également !

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Merci Golbiiins ???? C'est vrai qu'on aurait pu le citer : le CNRTL a longtemps été responsable du prodigieux TLFi qui n'est hélas plus mis à jour, ce qui m'a fait un peu mourir à l'intérieur. Je note pour un futur épisode retours.

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Ah ! Je pensais qu’on terminerait la saison par les épisodes avec Pascal Godbillon. Ils feront donc l’ouverture à la rentrée. ;) N’empêche que ce dernier épisode est très intéressant, comme d’habitude. Et je suis heureux de constater que l’aventure continue. :D

Merci pour ces moments toujours très attendus et bonnes vacances à vous trois.:aurevoir: