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Dehors les chiens, les infidèles
Catégorie : Aucune
Auteur/Autrice : Maïa Mazaurette (Proposer une Biographie)
Trois générations après la défaite des forces d’Auristelle contre les incroyants, les hommes ne connaissent plus qu’un monde plongé dans une nuit éternelle. Pour conjurer la malédiction divine, un seul espoir : réussir la mythique Quête qui ramènera la lumière sur le monde. Un exploit qui nécessite des talents complémentaires autant que des tempéraments bien trempés. Alors, tous les cinq ans, cinq adolescents sont condamnés à l’exil : la réussite, ou une errance sans fin dans la nuit…
Critique
Par Belgarion, le 22/01/2009
Maïa Mazaurette était jusque-là plus connue pour ses activités de bloggeuse libertine que comme écrivain. Et pourtant, force est de constater que son troisième livre, Dehors les chiens, les infidèles, qui relève de la plus pure dark fantasy a réussi avec brio son entrée dans le petit monde de la fantasy avec un monde uchronique très original qui se trouve rehaussé par une très belle couverture dans les tons ocre.
Aborder de plein fouet le sujet sensible de l’intégrisme religieux chez les chrétiens était éminemment glissant et le livre avait de grande chance de tomber dans la fange des multiples brûlots déjà écrits sur le sujet où la qualité n’était pas au rendez-vous. Or, la lutte entre Auristelle, la cité sainte avec son intégrisme et ses excès face à l’Occitan Noir et son Antepape où la perversité se mêle au mépris de la vie humaine est retranscrite sans concession avec une intelligence rare des deux côtés de la barrière. Evitant la surabondance de règles moralisatrices et d’a priori caricaturaux, l’auteur a au contraire su créer un récit intéressant et original dans ce sujet sensible où, à l’instar de la Compagnie noire de Glen Cook, aucun protagoniste n’est blanc comme neige et où tous sont emplis de violence, d’intolérance voire de cruauté.
Les premières pages démarrent fort avec une séance de torture des plus sordides qui réussit malgré tout le tour de force de nous faire rentrer dans l’esprit et la motivation des personnages principaux avec leur version biaisée du devoir, leurs peurs et le monde cruel qui les entoure. Car c’est là le tour de force de l’auteur : nous faire suivre cinq jeunes gens capables pour la plupart des pires extrémités pour leur Foi en parvenant petit à petit à les comprendre et surtout à les apprécier en dépit de leurs traits de caractères les plus abominables. Unis au sein d’un groupe soudé face aux vicissitudes du monde extérieur, le lecteur parvient à vivre avec ces cinq personnages dans les bons moments comme dans leurs pires extrémités, à l’instar de la froide inquisitrice Astasie qui n’hésite pas à tuer un enfant atteint du signe de la Bête ou de Vaast, ancien enfant de l’Occitan noir devenu espion et tortionnaire à ses heures. A l’inverse, Spérance, la guide du groupe, apparaît comme une bouffée de fraîcheur dans ce monde condamné avec d’un côté son froid pragmatisme mais aussi ses sentiments très humains, l’histoire d’amour qu’elle développe et sa Foi moins intransigeante que celle de certains de ses coreligionnaires.
Cette bonne analyse des caractères est associée à une intrigue construite avec originalité, découpée en plusieurs parties qui ont chacune leur intérêt. La première est plus ciblée sur les errances de la Quête de l’Etoile du Matin qui est le but de tout groupe de Quêteurs exilés de la cité d’Auristelle alors que la seconde aborde les problèmes des intrigues politiques mortelles et les conséquences d’un conflit à grande échelle. Le monde est peu développé en se ciblant sur quelques lieux emblématiques mais toutes les facettes qui nous sont représentées frappent par leur noirceur et leur précision dans les détails. Que dire par exemple de cette chape d’obscurité qui oblitère le ciel, limitant l’espérance de vie à quarante ans, anéantissant plusieurs centaines d’espèces animales et entraînant de multiples malformations chez les nouveaux-nés des générations suivantes ! La manipulation de l’histoire, la volonté de pureté de la race, l’extermination de tout ce qui ne rentre pas dans le moule ne sont pas sans rappeler les tristes heures de l’idéologie nazie et cette analogie est accentuée par l’ambiance de fin du monde qui règne dans le récit.
A l’inverse, on peut justement reprocher à l’auteur ce melting pot d’idées et de faits qui altère par moments la pleine compréhension du récit car abondance d’idées nuit à l’unité de toute histoire. De plus, tout stéréotype n’est pas absent du traitement de l’histoire et la fin laisse un sentiment d’inachevé au niveau géopolitique avec des ultimes péripéties surprenantes qui ne peuvent que laisser dubitatif sur l’avenir de ce monde. On regrette encore une fois les nombreuses fautes d’impression et fautes de frappe du livre qui risquent d’en faire soupirer plus d’un.
Le livre au final n’a pas vocation à juger et condamner les problèmes de fondamentalisme et se centre plutôt sur plusieurs caractères dans un monde en pleine déliquescence qui parviennent à en changer certains éléments. Certains lecteurs seront certainement rebutés par ce monde froid, mais le livre a véritablement beaucoup à offrir et pousse à réfléchir sur de nombreuses questions sans pour autant nous fournir des réponses toutes prêtes. On ressort chamboulé et hésitant de la lecture sans parvenir à définir l’impression exacte ressentie, mais on ne peut nier l’émotion qui saisit le lecteur au fil des pages. Et c’est là je pense le but principal de l’auteur qui est atteint avec cette volonté de choquer qui la caractérise.
7.5/10
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