Le Mythe de Merlin

Robert Baudry a fondé et présidé le CERMEIL : Centre d'Études et de Recherches sur le Merveilleux, l'Etrange et l'Irréel en Littérature. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela se sent, et que le monsieur connaît son domaine, et notamment l'entêtante figure de l'enchanteur, qui semble vouloir encore et toujours revenir au premier plan.
Par le biais d'une vingtaine de thèmes, dont les plus intéressants sont bien "La conception de Merlin", "Le cercle des Géants", ou bien encore "Les retours de Merlin", l'auteur nous brosse un véritable portrait particulièrement exhaustif, qui multiplie les angles et les perspectives pour mieux cerner ce fuyant personnage.
Et c'est peu dire que le grand magicien des Celtes n'est justement pas un personnage comme les autres, lui l'archétype de tant de magiciens à longue barbe blanche, et pourtant tellement plus que l'image que l'on retient souvent en premier lieu sans creuser plus loin. Robert Baudry s'emploie à nous le faire découvrir, passant d'un élément à l'autre, étudiant aussi bien la source de son pouvoir que sa diabolisation et sa christianisation.
Autre élément abordé de façon particulièrement utile, les œuvres et les apparitions de Merlin au fil du temps et des supports, notamment tout ce qui concerne le cinéma. Merlin et le monde arthurien à l'écran, c'est tout une histoire ! Avec du bon et du moins bon, comme souvent...
Avec près de 400 pages, on sent que l'auteur est parfois à l'étroit (on apprend ainsi que, "dès 1980, Robert Baudry a inauguré à Oxford la recherche sur les prolongements modernes de la légende arthurienne, avec une étude sur L'Enchanteur pourrissant de Guillaume Apollinaire"), et pourtant, on peut dire que cet ouvrage se montre tout de même des plus complets, riche et foisonnant de réflexions propres aux essais qu'il est bon de prendre en considération, et le tout sans lasser, comme lorsque l'on étouffe un bâillement poli dans un amphithéâtre.
Nul doute que certains trouveront encore cela trop cher ou pas franchement utile, mais ils regretteront sans doute de ne pas y jeter ne serait-ce qu'un coup d'œil...

— Gillossen